Quand Philadelphia admire des Qasrs, elle joue à Citadelle... suite
Plat, plat, plat il est le désert dans ce coin. Nous croisons des dizaines de camions chargés d’essence en direct depuis l’Arabie saoudite. Beaucoup de pays de la zone bénéficient de nappe d’or noir mais pas la Jordanie. La création de pays en a favorisé certains en leur attribuant plein de ressources alors que d’autres n’ont presque rien. Nous passons en bordure d’un gigantesque camp de réfugiés tenu par l’UNHCR en apprenant qu’il est rempli à 10% de sa capacité. La plupart des gens y ayant séjourné sont partis s’installer ailleurs ou sont retournés chez eux.
Roule, Phiphi, roule et à 13 heures gare toi devant le qasr (kasr, qsar, ksar… selon les traductions d’alphabets différents) al Azraq, la forteresse Bleue. Etonnant comme nom quand on sait que le bleu n’a pas forcément les faveurs du monde arabo-musulman. Il doit bien y avoir une raison à cette dénomination pour ce site, cette ville, mais je l’ignore, donc si…
L’oasis est fréquentée depuis le paléolithique, il faut dire qu’il n’y en aucun autre à quelques dizaines de kilomètres à la ronde. La bâtisse vit le jour du temps des romains vers 200/300, fut utilisée par les byzantins, les Omeyyades ou Umayyades et son allure actuelle lui vient des kurdes Ayyoubides (descendants d’Ayyoub) vers 1237 sous Izz ad-Din Aybak. Elle fut quartier général pour Hussein, lors de la grande révolte arabe de 1917 et du coup le célèbre Lawrence y séjourna. Bref, pratiquement 2 000 ans de service !
C’est une belle structure carrée, en basalte noir, avec de puissantes portes en pierre datant des romains. Le seul bois environnant, c’est du palmier et c’est pas top top question résistance. Du coup, tout ce qui pouvait être fait en pierre était fait en pierre !
Un petit tour dans la cour où une mosquée carrée trône. J’aime bien les marches pour rejoindre la terrasse faites de pierres dépassant les murs. Vu la construction, je me demande tout de même quelle est la part de réelle conservation et celle de reconstruction. Durée totale de la visite, y compris passage aux commodités, 25 minutes. C’est quand même tristesse de faire tous ces kilomètres et de ne pas prendre un peu plus de temps sur le site. Je sais, c’est le principe du voyage organisé, bien souvent plus de temps à la buvette qu’au musée ! En ce jour particulier, j’accorde une excuse potentielle, peut-être qu’ainsi nous rentrerons à l’heure pour…
Buvette, buvette… Il est temps d’aller déjeuner… Ce sera dans un resto touristique offrant un buffet et un maqluba ou retourné. C’est un plat de riz servi avec du poulet. Dommage, il n’y a pas de tahdig à ce retourné mais en même temps s’il y en avait, on se battrait peut-être pour le manger. C’est bon et s’y ajoute un Coca à 1 JOD, le moins cher du voyage ! En voyage, je cherche à boire au moins un Coca par jour, à titre préventif (enfin surtout gourmandif !).
La remontée vers Amman commence à 14h10. Cela devrait le faire pour ce soir… Il n’y a plus que 2 "châteaux" à découvrir. Sous le vocable de châteaux sont rassemblés forts, relais de chasse, caravansérails… Touristiquement parlant, cela fait probablement mieux de les nommer ainsi.
Et voilà déjà le premier: Amra ou le petit palais. Ici je sais qu’il y a de belles fresques et je sens bien qu’il n’y aura guère de temps pour prendre le temps. J’aurai totalement raison car descente et montée de bus comprises l’arrêt durera 30 minutes ! Du coup, c’est vite, vite le plus vite que je peux j’y rentre, bien évidemment sans écouter les explications.
C’est considéré comme étant un petit pavillon de chasse construit vers 743. Il y a 7 pièces dont des bains et chacune est illustrée d’un thème : chasse, zodiaque, pratique du bain… C’est entre abimé, grafitté et bien conservé. Cependant, c’est tout beau et vaut largement l’arrêt ! Le bâtiment d’à côté abrite le puits Comme bien s’autres sites, il est classé au patrimoine mondial pour son unicité. Je ne suis guère fan de la restauration entamée en 2010 par une équipe italienne. On voit la différence dans le plafond de l'entrée, je préfère les parties non nettoyées. Ai-je vu un coq dans les fresques ? Vite, vite un rapide tour aux commodités et s’en va Phiphi…
Le désert nous offre tornadettes de sable sur ocres platitudes. La grosse masse presque carrée, d’Al Kharaneh, est visible de loin. Presque carré car il mesure 36,5 sur 35,5 mètres à l’extérieur tout en bénéficiant d’une cour en 13 par 13. Que fut-il, cela reste du domaine des interrogations. Très probablement un caravansérail car il comprend des écuries, des greniers et des chambrées. De très nombreuses caravanes circulaient dans ce désert et avaient besoin d’espaces de repos.
Il est évalué datant d’avant 710, une inscription, trouvée dans une des pièces, à cette date atteste qu’il existait. Abd al-Malik, fils de Ubayd a écrit: "Le lundi, 3 jours avant le mois de Muharram en l'an 92,…" soit le 24 novembre 710. C’est un des premiers exemples d’architecture islamique dans la zone. Les humains de l’époque n’avaient pas peur d’entreprendre de tels chantiers sans moyens techniques d’importance.
Une particularité m’a intéressée. La région subit régulièrement des tremblements de terre et la forme des murs est identique à celle utilisée par les incas pour y résister. Il s'agit d'un trapèze plus large à la base qu’en haut. J’ai toujours la même interrogation sur les rénovations/reconstructions car tout cela me semble trop intact, en particulier à l’extérieur. Les marqueurs permettant de définir le reconstruit sont trop peu visibles à mon goût. Des visiteurs doivent imaginer qu’il a traversé les siècles en restant intact !
Le record du jour, en matière de vitesse de visite, est battu puisque nous ne sommes restés que 20 minutes y compris le temps d’aller du bus au parking et d’en revenir. Du coup, je suis bien échauffée pour ce soir, vu la course que cela a été pour parcourir quelques salles du premier étage !
Le détail route du jour nous vient des cafetières monument d'entrée de ville. Elles symbolisent une communauté bédouine.
Je savais que j’allais faire un voyage en mode survol, j’y étais préparée car comme je l’ai dit à diverses personnes "Entre rien du tout et un peu, je prends tout de même un peu". Cela n’empêche que j’espérais un peu plus, juste pour prendre le temps d’entrer en mode arrêt admiration. Là, ce fut en mode gym tonic !
Le point plus de ce rythme, fut que le bus s’est garé devant l’hôtel vers 17 heures. Du coup, il y a même eu le temps d’une douche avant de s’installer au bar devant une bière (nous étions dans un hôtel vendant de l’alcool), un plateau de grignoteries et encore assez d’énergie pour encourager, applaudir, crier… C’est là, que la Dream5 est née car nous étions 5 à encourager les français alors que les autres présents, surtout des locaux, soutenaient la Croatie.
Nous avons profité des images jusqu’à la remise de la coupe, puis diné et finalement suivi les festivités à Paris grâce à TV5 Monde dans nos chambres…
Pour l’anecdote, je n’y croyais guère à ce titre car j’ai réservé ce voyage pendant la première partie de la coupe et vu le niveau me suis dit "Aucune chance". Par contre, j’avais pronostiqué la Croatie. De toutes façons, voir à la télé que ce soit à Amman ou en Martinique, cela ne change guère !
Et c’est en étant Champion du Monde que ce soir mes yeux se ferment… Champion du Monde…