Dis, après une belle Décapole, tu joues à forteresse...
Et c’est reparti pour un nouveau renversé avec un qabsa fait de riz et de poulet. La petite déception de ces divers renversés, c’est que jamais nous ne les avons vu se faire renverser. Les plats arrivaient déjà retournés et du coup la magie du renversement n’a pu avoir lieu ! Le poulet est tendrement bon et quasiment tout le monde en reprend. La découverte du jour sera pour la limonana, une bien jolie verte citronnade faite de jus de citron, de feuilles de menthe et de glace pillée. Le tout est puissamment mixé. J’ai tellement apprécié que j’en ai bu 2 de suite. Mon addition boisson du jour se monte à 10 JOD, le Coca m’a été offert par le patron pour me consoler de ma douleur. J’ai testé un expresso, bon pas mieux que celui du matin. Mon cerveau était un peu à l’arrêt après mes péripéties et la lancinante douleur, je n’ai même pas pensé à pixeliser la préparation de la verte boisson et à commander un café grec/turc/libanais ou autre !
Phiphi attend bravement sur le parking et à 13h30 se remet au travail. Il s’en va tranquillement vers la ville d’Ajloun à 22 kilomètres. Le paysage prend de vertes allures, la région est le grenier du pays. Les oliviers et les pins prédominent mais des serres sont aussi visibles. Nous sommes dans la vallée du Jourdain, sur un plateau oscillant autour des 700 / 800 mètres entouré de montagnes pouvant dépasser les 1 200 mètres.
J’en profite pour bien désinfecter la blessure à l’huile essentielle (HE) de lavande. Depuis tous temps, c’est un de mes indispensables à la maison et en voyage. Cette HE est un désinfectant naturel, elle aide aussi à cicatriser. Toutes nos coupures, piqures d’insecte, brûlures sont soignées par elle. Donc, je badigeonne bien, j’ai l’impression de voir l’os mais n’en suis pas sûre, commence à me demander comment je vais faire demain avec l’eau salée… Et la route file…
A Ajloun, nous passons en proximité de la mosquée et de son célèbre minaret effilé. C’est une des plus vieilles du pays datée d’au moins 800 ans construite sur les bases d’une ancienne église byzantine. Tout en haut de la colline dominant la ville se trouve la forteresse, but de visite.
Elle fut construite lit-on partout, en 1184, sous Saladin. Son emplacement domine 3 routes majeures du secteur et l’accès à des mines de fer. C’était une position stratégique que les croisés francs ont tenté de prendre, en vain. Les mongols réussirent en 1 260, détruisirent le site qui fut reconstruit pour tomber sous domination des mamelouks venant d’Egypte puis des ottomans ou turcs. Comme beaucoup d’autres bâtiments dans la région, il fut endommagé par divers tremblements de terre dont ceux de 1837 et 1927. Cela c’est l’Histoire avant que des mosaïques, d’une église byzantine soient découvertes. Les travaux entrepris ont permis de conclure que la bâtisse était construite sur les bases d’un ancien monastère datant du IXème siècle au plus tard et n’était donc pas architecture originelle…
Quatre puis sept tours, des meurtrières, des citernes, des douves profondes de 15 mètres, de multiples pièces, des terrasses… une forteresse dans toute sa fonction et toute sa splendeur.
Il fait frais sous la protection de ces épais murs, sous ces belles voutes et encornures. Il fait beau admirer la vue tout autour. Il fait joliesse à suivre les petits carreaux dessinant poissons et croix, les symboles de la chrétienté. Il fait souvenirs des temps passés avec un petit tour au musée archéologique…
Tout à coup, sans l’avoir cherché, dans une salle pleine de boulets de canon, c’est boulets aux pieds. Mes oreilles perçoivent un floc-floc anormal. Du coup, je regarde mes chaussures et les deux semelles ont perdu la bataille de la résistance au sec. Je tente d’arracher ce que je peux pour terminer la visite. Je fais très attention dans les dernières pièces et les escaliers me menant vers la sortie. Il faut dire que dans ma famille, les semelles de chaussure se décollant sont synonymes de cata, de grande tristesse car de deuil.
Je tente tout de même une admiration des murs extérieurs, de la fresque d’accueil représentant Saladin par le passé et aujourd'hui un cavalier tronqué (tronqué pourquoi, reste un mystère auquel personne n'a pu me répondre) des commodités… et enfile la dernière paire de papousinette à ma dispo m’attendant sagement dans Phiphi, au cas où…
Le détail route du jour nous vient d’un magasin. Quand on voyage, il arrive parfois qu’on ait des a priori du genre "Impensable de voir cela…". Ce fut le cas avec la devanture bien flashy en mode Corona sur J&B du liquor store d’Aljoun !
Ce soir, il va falloir que j’aille faire des courses car si je peux envisager les 2 prochains jours sans chaussures de marche, impossible pour Pétra. Ramzi, le guide, me conseille d’aller au Taj Mall, à 5 minutes en voiture de l’hôtel. La vie vous fait parfois de sympathiques clins d’œil, j’ai bcp hésité entre la Jordanie et le Rajasthan pour ce voyage car j’avais très envie de voir le mausolée dédié à Mumtaz. Du coup j’irai voir son mall. Cependant, entre les deux mon cœur ne balance pas car je suis très peu fan de centres commerciaux et de virées shopping !
Pendant le trajet retour, une question d’orga se règle. Hier, il nous a été proposé deux ajouts de visite. Chacun coûte 15 JOD mais ils ne peuvent se faire que s’il y a consensus. Avec divers participants nous y avons vu un côté "achat obligatoire". Car comment être celle ou celui disant NON à tous les autres ? Il aurait été plus facile de les inclure au programme en augmentant légèrement le coût total. Le premier sera de passer demain, par Béthanie, lieu de baptême du Christ. Tout le monde dit oui…
Encore un virage et nous sommes à l’hôtel, il est 17h20. Le temps de se refaire une propreté car il y a de la poussière accumulée dans les encornures et me voilà dans le hall à demander à Sarah, la très sympathique et aidante réceptionniste, de m’appeler un taxi. En fait, il y en a des chauffeurs privés sur site et du coup c’est départ immédiat. 5 JOD, plus tard j’entre dans cet antre de la consommation. C’est un voyage dans un monde hors-national à non-dépaysement garanti, sur 5 étages ! Tiens un Paul, un H&M, un Geox, un Gap, un Occitane, un Swarovski… sans compter les MacDo, Pizza Hut et autre Popeye. Quant aux prix, même si ce sont les soldes, ils sont aussi internationaux. A Paris, j’avais repéré un sac dans une boutique de gare et là, il y a le même, au même prix ! Il y a tout de même quelques enseignes locales plus un cinéma, un petit train pour les enfants… J’y vois plus de jeunes filles en short et tee-shirt ultra court qu’enfoulardées.
Au magasin de sport, rien ne me va. A force de marcher pieds nus, les pieds s’étalent et ont du mal à rentrer dans des mini largeurs. Au T1, il y a un Go Sport qui ne vend pas de chaussures de rando mais des sneackers/baskets. Du coup, j’embarque la première paire de Reebok de ma vie, à 30 JOD. J’en suis très contente car ce sont des pantoufles ultra légères. Retour at hôtel, le chargé d’accueil du centre m’indique où sont les taxis jaunes et me conseille de demander "kilometers" pour ne pas payer le prix Touristes. Le tunnel, le gros rond-point, la colline… à force de passer par là matin et soir je commence à reconnaître. C’est 1,40 JOD pour la "World champion".
C’est une soirée Champs-Elysées mais sans Drucker et avec les footeux qu’on espérait en vitesse tortue mais dont le chauffeur avait dû manger du lièvre. Décevante, cette descente vue cathodiquement et réellement encore plus d’après des proches.
Et mes yeux se ferment en revoyant des volutes, des feuilles d'acanthe, des pierres taillées...